Bruit ferroviaire : Québec durcit les normes – Impacts et solutions

Acoustique générale • 9 janvier 2025

Depuis le 1er décembre 2024, le gouvernement du Québec a émis un nouveau cadre normatif visant à atténuer les nuisances et réduire les risques d’origine anthropique relatifs au transport routier, ferroviaire et aérien ainsi qu’aux sources fixes de bruit. Cette initiative marque un durcissement notable des exigences, en particulier pour le bruit ferroviaire, avec l’objectif d’améliorer la qualité de vie des citoyens et de réduire les impacts négatifs du bruit sur les environnements résidentiels.

Cet article compare les nouvelles exigences québécoises aux lignes directrices fédérales sur lesquelles de nombreuses municipalités se sont appuyées. L’impact de ces changements sur les municipalités, les promoteurs immobiliers et les résidents sera analysé, en particulier en ce qui concerne les coûts et les pratiques de construction. Enfin, des solutions concrètes seront proposées pour faciliter une conformité à ces nouvelles normes.

Des normes provinciales plus strictes que les recommandations fédérales pour le bruit ferroviaire

Concernant le bruit ferroviaire, de nombreuses municipalités et MRC du Québec se sont appuyées sur les lignes directrices de la Fédération canadienne des municipalités (FCM) et de l’Association des chemins de fer du Canada (ACFC) (Figure 1) pour rédiger leurs règlements. Toutefois, la nouvelle norme provinciale (Figure 2) est désormais plus restrictive que ces recommandations fédérales.

AC1.4 // CRITÈRE DE BRUIT RECOMMANDÉS POUR LES NOUVEAUX AMÉNAGEMENTS RÉSIDENTIELS OU AUTRES UTILISATIONS SENSIBLES DU SOL À PROXIMITÉ DES CORRIDORS FERROVIAIRES (MARCHANDISES)

TYPE D'ESPACE PÉRIODE NIVEAU SONORE MAXIMUM
Leq* (dBA) Rail**
NIVEAU SONORE EXTÉRIEUR MAXIMUM Leq* (dBA)
Chambres à coucher De 23 h à 7 h 35 50
Salles de séjour/salles à manger De 7 h à 23 h 40 55
Aires de séjour extérieures De 7 h à 23 h 55*** S.O.

* Applicable seulement aux bruits du transport
** Les niveaux sonores intérieurs maximums ne sont utilisés que pour déterminer les exigences relatives aux éléments acrchitecturaux. Les niveaux sonore extérieurs en façade servent à déterminer les exigences relatives à la climatisation.
*** Des mesures d’atténuation sont recommandées si les niveaux sonores se situent entre 55 et 60 dBA; s’ils sont de 60 dBA ou plus, on devrait mettre en place des mesures d’atténuation pour réduire le bruit à une valeur aussi proche que possible de 55 dBA.

Figure 1 : Lignes directrices relatives aux nouveaux développements résidentiels à proximité de corridor ferroviaire (Source: ACFC et FCM)

 

Figure 2 : Extrait du nouveau cadre normatif sur le bruit au Québec

Des impacts sonores positifs, mais des coûts en hausse

Avec la nouvelle norme provinciale, le climat sonore devrait donc s'améliorer par rapport aux pratiques courantes au Québec jusqu’à maintenant (2024). En contrepartie, les coûts associés à la fenestration ou à la protection extérieure, comme l’installation d’écrans acoustiques, seront plus élevés.

Coûts en hausse pour l’insonorisation des pièces intérieures

En effet, alors que la norme fédérale impose un seuil de 35 dBA à l’intérieur des chambres à coucher, calculé sur une moyenne de bruit entre 23 h et 7 h, les nouvelles normes québécoises étendent cette exigence à la période de 19 h à 7 h, sans distinction selon l’usage des pièces.

Cette modification pourrait entraîner une augmentation des besoins en insonorisation des façades et des fenêtres, et par conséquent, des coûts de construction plus élevés. Dans les lignes directrices fédérales, les promoteurs bénéficiaient d’une certaine flexibilité en aménageant les logements de façon à placer les pièces moins sensibles au bruit — telles que les cuisines, salons ou salles de bain — du côté le plus exposé. Les seuils de bruit étaient en effet plus élevés pour ces usages. Avec les nouvelles normes provinciales, le même niveau de vitrage sera requis, peu importe la pièce de vie concernée.

Coûts supplémentaires pour respecter les seuils extérieurs

Pour les espaces extérieurs, le seuil de bruit est fixé à 55 dBA dans les deux cadres normatifs. Toutefois, la métrique utilisée et les périodes d’évaluation diffèrent.

Dans le cadre provincial, le seuil est basé sur le Lden (Level Day Evening Night), une moyenne sur 24 heures pondérée de +5 dB pour le soir et de +10 dB pour la nuit. Cette approche est plus stricte que le cadre fédéral, qui propose une moyenne de 55 dBA calculée entre 7 h et 23 h. Il est difficile d’établir une différence de décibel entre les deux métriques, car cette différence dépendra fortement des horaires de passages de train.

En supposant une répartition uniforme des passages de trains le jour, le soir et la nuit, le cadre provincial s’avère environ 6 dB plus restrictif. Dans certains cas, atteindre un niveau sonore inférieur à 55 dBA LAeq, 24 h sur l’ensemble d’un terrain résidentiel est très difficile, voire impossible, sans l’installation d’un écran acoustique conséquent. Pour respecter le seuil de Lden 55 dBA, il faudra donc prévoir des écrans encore plus imposants et potentiellement sur une localisation plus étendue.

Une autre solution pour les municipalités serait de ne pas imposer le seuil de 55 dBA sur l’ensemble du terrain, mais uniquement dans certaines zones d’agrément protégées du bruit par la résidence elle-même.

Concernant le processus d’examen des nouveaux aménagements résidentiels, la distance de 300 m d’une emprise ferroviaire pour régir la construction résidentielle est cohérente avec les normes fédérales.

Également, aucune modification n’est à signaler concernant les vibrations.

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Comment se conformer aux nouvelles normes sonores provinciales?

La première étape consiste à faire appel à un ingénieur acousticien pour analyser le climat sonore spécifique à chaque projet. Cette analyse permettra de déterminer quelles mesures d’atténuation doivent être mises en place pour répondre aux nouvelles exigences sonores, que ce soit pour l’intérieur ou l’extérieur des bâtiments.

Par exemple, une idée reçue est que le triple vitrage offre toujours de meilleures performances acoustiques. Pourtant, dans de nombreux cas, un double vitrage bien dimensionné est plus efficace et suffisant. Le choix judicieux des matériaux d’insonorisation aura un impact direct sur les coûts de construction des condos ou des maisons. Heureusement, cette étape reste relativement simple à mettre en œuvre en phase de conception.

Un défi plus important risque d’être lié aux exigences de limitations aux zones extérieures qui ont des contraintes sonores plus strictes. Cela pourrait nécessiter des méthodes de contrôle à la source du bruit ferroviaire ou une conception stratégique des espaces de vie afin de mieux les protéger du bruit ambiant.

Rédacteurs de l'article:

Anthony Gérard, ing., Ph. D.
Directeur de la Consultation acoustique et vibrations
514-727-3800, poste 324

Quentin Lerognon, ing.
Chargé de projet, spécialiste en développement résidentiel
514-727-3800, poste 339

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