Dans les dernières années, l’organisme Lab-École s’est donné un défi de taille: celui de revoir la manière dont sont faits les lieux d'éducation et de créer les écoles de demain. Par contre, qui dit nouvelle approche dit nouveaux défis, avec aucun projet similaire sur lequel se référer. C’est dans ce contexte que Soft dB et sa vaste équipe d’experts en acoustique a été appelée pour porter soutien à l’équipe de conception du tout premier projet de Lab-École du Québec: celui de l’École Stadacona dans la Ville de Québec.
Les nouvelles approches mises de l’avant par l’organisme Lab-École ont introduit de nouvelles approches de conception qui pourraient paraître incompatibles au niveau de l’acoustique.
- Une classe extérieure en plein milieu urbain de la Ville de Québec?
- De grands espaces vitrés, épurés, en bois, mais qui ne doivent pas créer de cacophonie?
- Une cour d’école en toiture du bâtiment, directement au-dessus des bureaux du personnel?
Oui, ce sont tous des défis auxquels ont été confrontés l’équipe de conception, composée entre autres d’ABCP Architecture, Tetra Tech et Pageau Morel, et auxquels les experts de Soft dB les ont aidés à paver ces nouveaux chemins.
Peut-on dire que le défi a été relevé? Tout semble indiquer que oui, car en plus d’avoir été un des projets finalistes au prix d’excellence en architecture de l’Ordre des Architectes du Québec (OAQ), le projet vient tout juste d’être retenu par l’Association des Architectes en Pratique Privée du Québec (AAPPQ) comme l’un des 25 projets présentés dans son Manuel de référence pour l’année 2023.
Explorons donc comment les experts de Soft dB ont pu mettre en pratique leur savoir-faire afin de contribuer à faire de l’école Stadaconna le succès qui fait tant parler.
Gérer des usages incompatibles
Il n’est pas nécessaire d’être acousticien pour réaliser qu’une cour d’école située directement au-dessus d’espaces sensibles au bruit (dans ce cas-ci les bureaux du personnel de l’école) n’est pas un agencement souhaitable et impliquera de bons défis lors de la conception.
Pour réussir à faire cohabiter ces usages difficiles, il est important de savoir les identifier tôt dans le processus de conception, car dès le choix de certains paramètres, tels que le type de structure du bâtiment, les types et l’envergure des solutions possibles au niveau de l’acoustique sont grandement impactées.
Par la suite, arrive la phase de conception des moyens d’insonorisation. « La clé du succès n’est pas, comme on pourrait peut-être croire, de choisir une cloison qui semble performante, selon le CNBC », relate François Thibodeau, ingénieur et chargé de projet chez Soft dB qui a travaillé sur le projet.
« C’est plutôt de bien savoir prédire les niveaux sonores attendus de part et d’autre des cloisons, leurs répartitions fréquentielles et leurs moyens de propagation afin de concevoir les assemblages afin que les intrusions sonores soient imperceptibles pour les occupants d’un local donné. C’est un processus qu’il faut prendre le temps de faire au cas par cas pour des espaces comme ceux qu’on retrouve au Lab-École de Québec. »
En effet, avec des impacts au sol comme principale source sonore dans la cour de récréation, l’assemblage plancher/plafond a demandé une attention très particulière dans le projet.
Des traitements qui s’entendent, mais qui ne se voient pas
Une orientation claire des écoles de demain est qu’elles ne doivent plus avoir l’esthétique d’un espace liminal comme ce fût le cas depuis des décennies. Pour ce faire, une approche architecturale visant sur de grandes surfaces vitrées, en bois ou tout autre matériau permettant un look minimaliste est mise de l’avant.
Malheureusement, cette approche constitue aussi un cocktail parfait pour des espaces qui seront cacophoniques et inconfortables au niveau de l’acoustique.
« Les gammes de matériaux acoustiques offerts ont beaucoup évoluées dans les dernières années. On est arrivé au point où il est maintenant possible d’intégrer des quantités importantes de traitements absorbants sans qu’ils ne soient faciles à déceler par les occupants », explique M. Thibodeau. « Nous sommes là pour tenir à jour les équipes [de conception] sur ces possibilités, mais aussi pour les informer des implications qui y sont associées, notamment au niveau des coûts, des performances acoustiques, enjeux d’entretien, d’installation ou de durabilité, afin que le choix final soit la décision la plus éclairée possible. »
Une des pièces maitresses de l’école Stadaconna est son gymnase à fini en bois, mais a tout de même les performances acoustiques suffisantes pour permettre la tenue de conférences et d’évènements.
Apprendre en plein air au centre-ville?
L’idée d’une classe en extérieur située au toit du bâtiment en est une qui semble hors de tout doute bénéfique pour l’apprentissage des étudiants. Quand on se rappelle qu’elle est aussi située dans un secteur très urbain, à courte distance d’une autoroute, il devient aussi évident que l’acoustique y est un enjeu de taille.
Le but n’est pas de rendre cette classe aussi silencieuse qu’une bibliothèque, ce qui serait à toute fin pratique impossible à réaliser, mais plutôt de minimiser la contribution sonore des bruits urbains là où se tiendront les élèves. Une étape primordiale pour y arriver est de caractériser précisément le climat sonore.
« Une mesure du climat sonore, faite avec du savoir-faire, permettra non seulement d’être valide lors de la vérification de la conformité sur le bruit communautaire, mais il sera aussi possible de s’en servir comme intrant de conception pour le calcul des intrusions sonores vers les espaces d’apprentissage, particulièrement la classe extérieure. » C’est ce qu’explique Guilhem Dufossé, ing. PRT et autre chargé de projet ayant collaboré à la conception de l’école, en se rappelant les étapes qui ont été nécessaires pour concevoir cet espace très particulier.
« Par la suite, il est possible de réaliser un modèle de simulation acoustique du quartier qui nous indique, entre autres, les niveaux sonores attendus à chaque façade du bâtiment. On a tout ce qui faut pour ensuite assister l’équipe de conception dans les choix d’orientation de la classe, les finis de surfaces ou toute autre mesure qui permet de minimiser les intrusions sonores. »
Le premier projet de Lab-École au Québec a consisté, pour tous les intervenants impliqués, en un vrai laboratoire testant les manières de faire des dernières décennies. L’acoustique n’a pas fait exception à cette règle et a présenté des défis de conception qui a demandé l’apport des experts en acoustique aguerris de Soft dB.
De la classe extérieure au look moderne, passant par les cours de récréation en toiture, les chargés de projet de Soft dB savent traduire toute demande nouveau genre en méthodologies de conception adapté qui permet d’arriver à des résultats qui conviendront aux usages des occupants et aux besoins du client.
Crédits photos : Maxime Brouillet
